La saison cycliste 2014 est maintenant terminée et alors que l'équipe africaine MTN-Qhubeka est sur le point de démarrer sa préparation de la saison 2015 avec un stage du 23 au 30 novembre au Spier Wine Farm dans le Cap-Occidental de l'Afrique du Sud, il n'est néanmoins pas trop tard de revenir sur les performances de l'équipe dans son premier Grand Tour, la Vuelta a España 2014.
Alors qu'elle vient d'annoncer avoir obtenu une nouvelle licence UCI Pro Continental Team, pour la 3ème année de suite, l'équipe africaine espère participater cette année au Tour de France et l'invitation pour le Tour de Qatar et pour le Tour d'Oman par A.S.O. (le même organisateur que le Tour) pourrait être un bon début en vue de cet objectif.
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MTN-Qhubeka dans le Tour d'Espagne 2014
Le 23 août dernier, MTN-Qhubeka est rentrée dans l'histoire en étant la première équipe africaine à participer dans un Grand Tour - La Vuelta (le Tour d'Espagne). Pour une équipe Pro Continentale avec un budget de seulement 4 million d'euros c'était une performance en soi et une étape importante en route vers le Tour de France. Il y a beaucoup d'aspects qui font de MTN-Qhubeka une équipe à la fois intéressante et unique dans le peloton professionnel. Pour en nommer quelques uns : il s'agit de la toute première et de la seule équipe africaine Pro Continentale et celle-ci court dans l'objectif de faire connaître l'association Qhubeka. Selon le manager de l'équipe, Douglas Ryder, cette association "participe à une action durable plutôt que juste de l'aide temporaire" et permet de mobiliser des gens en manque de moyens avec des vélos. L'association Qhubeka aide également à développer la pratique du vélo au sens large en Afrique en plus de la mise en place de projets environnementaux.La selection de coureurs de MTN-Qhubeka pour la Vuelta a été une surprise pour de nombreux du cyclisme international, puisqu'elle ne comprenait pas des vainqueurs d'étapes dans des Grand Tours comme Linus Gerdemann et Ignatas Konovalovas. En effet, l'équipe a tenu à respecter une de ses principales valeurs, le développement de jeunes talents africains. Dans l'équipe pour la Vuelta on trouvait également le coureur allemand Gerald Ciolek et l'Espagnol Sergio Pardilla. Ces deux coureurs ont été indispensables pour MTN-Qhubeka dans l'accompagnement de jeunes coureurs et dans l'aide apportée aux coureurs africains dans l'adaptation à la rigueur des courses européennes. Le sprinteur italien Kristian Sbaragli faisait également partie de l'équipe, en tant que poisson-pilote pour Gerald Ciolek.
Les six autres coureurs étaient tous d'origine africaine, dont les 4 Sud-Africains Jay Thomson, Jaco Venter, Louis Meintjes et Jacques Janse Van Rensburg. Jay Thomson et Jaco Venter avaient des rôles de coéquipiers avec leur profil de spécialistes de l'échappée et bosseurs dans l'équipe. Jacques Janse Van Rensburg et le Champion Sud-Africain de Cyclisme sur Route, Louis Meintjes, faisaient partie de la sélection pour leur profil de grimpeur.
Les coureurs éritréens Merhawi Kudus et Daniel Teklehaimanot complètaient l'équipe MTN-Qhubeka pour la Vuelta. Teklehaimanot avait déjà prouvé être un spécialiste du contre-la-montre et d'échappées au long cours, alors que Kudus est un très bon grimpeur. Dans sa première saison de pro, il a terminé deuxième au Tour du Langkawi. Ces deux coureurs éritréens ont tous les deux connu une entrée intéressante dans le monde du cyclisme pro et sont tous deux issus du World Cycling Centre Africa (WCCA). Ce centre basé à Potchefstroom en Afrique du Sud est dirigé par Jean-Pierre van Zyl qui contribue également largement à son bon fonctionnement. Il est secondé dans ce rôle par Andrew Smith qui est coach et directeur sportif, en plus de remplir bien d'autres rôles. Le WCCA est une source de plus en plus importante de nouveaux coureurs pour MTN-Qhubeka et joue un rôle clé dans le développement de jeunes coureurs africains. Vous pourrez bientôt découvrir le WCCA plus en détail dans un futur article sur Velowire. Jean-Pierre van Zyl est resté très humble en répondant à la question de ce que représentait pour lui le fait d'avoir des anciens du WCCA au départ de la Vuelta :
En parlant avec le directeur sportif Andrew Smith du WCCA il devient évident que le WCCA fait un travail d'un professionnalisme incroyable, malgré son tout petit budget de fonctionnement. Il a été extrèmement efficace dans l'identification et le développement de coureurs talentueux africain vers le niveau professionnel. Dans une conversation avec Andrew il mettait en avant :
- L'impact du WCCA dépasse celui qu'on voit sur MTN-Qhubeka, car dans la Vuelta de cette année on a vu la plus grande présence de coureurs africains dans un Grand Tour depuis toujours. Chez Europcar il y a le Champion éritréen Natnael Berhane qui est également issu du WCCA et le Namibien Dan Craven qui a régulièrement couru avec le WCCA et on voit ainsi que les coureurs ont mis à profit les opportunités que Jean-Pierre et le Centre ont pu leur offrir.
Le manager de MTN-Qhubeka, Doug Ryder, était au coeur de l'équipe depuis sa création et a osé rêver qu'un jour une équipe africaine pourrait participer au Tour de France. Avant le départ de la Vuelta nous lui avons demandé ce que représentait la participation de MTN-Qhubeka au Tour d'Espagne pour lui personnellement. Sa réponse était courte mais très parlante ...
- Très peu de gens arrivent à réaliser leur rêve et la plupart des coureurs ici ne pouvait que rêver de participer dans un Grand Tour. Leur présence est donc impressionnante, vu que peu de gens arrivent à réaliser leur rêve. Nous sommes sur le point d'exposer le cyclisme africain au monde.
Malgré le côté romantique de la participation de MTN-Qhubeka dans son premier Grand Tour, le côté rude du test était déjà visible. Les grands noms du cyclisme, Alberto Contador et Chris Froome cherchaient tous les deux à se refaire une beauté avec leurs abandons dans le Tour de France alors qu'Alejandro Valverde était extrêmement motivé de monter sur le podium dans le Grand Tour de son pays. Dès le départ on savait donc que cela allait être une course extrêmement dure et pour MTN-Qhubeka donc un baptême de feu. Pour une équipe qui faisait ses débuts dans un Grand Tour il y avait beaucoup de moments de joie, des surprises et des déceptions pendant les 21 étapes sans relâche. En voici quelques uns ...
étape 1 - L'équipe MTN-Qhubeka a été bien reçu par l'organisation de la Vuelta a España et elle devait même interrompre la préparation de son contre-la-montre pour un tour de Jerez de la Frontera derrière cheval. Malgré cela, l'équipe restait concentrée et terminait à la 12ème place, seulement 2 secondes derrière Team Sky et devant Astana, IAM Cycling et Garmin-Sharp. S'il y avait encore des doutes pour certains, cela a été un message très clair : MTN-Qhubeka était à la Vuelta pour faire la course.
étape 2 - C'était la première étape en ligne et Jacques Van Rensburg était dans l'échappée du jour qui a été repris à 16 kilomètres de l'arrivée. L'étape se terminait au sprint et a été remportée par Nacer Bouhanni, mais l'association Qhubeka faisait également partie des gagnants : en effet, la présence de Jacques Van Rensburg en tête de la course a permis à l'association d'être bien visible à la TV partout dans le monde.
étape 3 - Cette étape couvrait 198 kilomètres du port de Cadiz jusqu'à Arcos de la Frontera, et les quatre montées du jour avec un dénivelé positif total de 2500m la rendait difficile. Malgré ses efforts la veille, Jacques Van Rensburg avait suffisamment bien récupérer pour à nouveau se montrer fort et représenter MTN-Qhubeka dans l'échappée. Cela donnait à nouveau une précieuse visibilité à l'assocation Qhubeka et, tout aussi important, enlevait la pression des autres coureurs MTN-Qhubeka qui se sentaient ainsi plus libre d'attaquer plus tard dans la course. Au final, la victoire d'étape était pour Michael Matthews (Orica-GreenEDGE).
étape 4 - En tant que plus jeune coureur de la Vuelta, avec ses 20 ans, Merhawi Kudus était content de pouvoir participer à son premier Grand Tour. Je suis content de pouvoir participer à mon premier Grand Tour, et aussi de courir avec des amis et les meilleurs coureurs pro. Néanmoins, une chute sévère était à l'origine d'un important rappage de peau et de profondes blessures nécessitant des points. Merhawi a ainsi connu le côté le plus dur du sport. Plutôt que de pouvoir se battre pour obtenir de bons résultats, la gravité de ses blessures a fait de chaque étape un dur combat de survie.
étape 5 - Depuis le début, les objectifs rêvés de MTN-Qhubeka étaient de gagner une étape ou de prendre un maillot. Le contre-la-montre par équipes dans lequel l'équipe avait brillé lors de la 1ère étape, en plus des bonnes performances de Sergio Pardilla, lui mettaient le maillot blanc du 'combine' en ligne de mire. Ce maillot est attribué au coureur qui est le mieux placé dans les classements 'Général', 'Sprints' et 'Meilleur Grimpeur'. Lors de l'étape 5 Sergio a attaqué sur la montée Puerto El Saltillo, longue de 800m, en prenant ainsi les points pour le classement de meilleur grimpeur au sommet. Ce n'étais pas seulement une surprise pour le peloton mais aussi pour l'organisation de la Vuelta, qui oubliait de notifier MTN-Qhubeka de la remise du maillot après l'étape. Impressionnant pour Serge Pardilla de prendre un maillot de leader pour la deuxième année de suite pour MTN-Qhubeka dans un tour important (voir notre précédent article qui revenait sur 2013. Le maillot blanc du 'Combiné' passait d'abord à Valverde et a finalement été remporté par Alberto Contador.
étapes 5 et 8 - Alors que la deuxième place de Gerald Ciolek dans le Tour du Danemark avait confirmé qu'il était en forme juste avant la Vuelta, il a connu un tour tranquille selon ses références élevées. En difficulté dans des températures de 40°C, il a montré son professionalisme en concentrant son énergie et son expérience sur l'aide de ses coéquipiers. D'abord en aidant Sergio Pardilla de maintenir une bonne place au classement général et ensuite en aidant les différents coureurs africains de prendre la bonne échappée.
Lors des étapes 5 et 8, Kristian Sbaragli avait sa chance de sprinter pour la victoire et n'a pas déçu en terminant d'abord à la 9ème place puis quelques jours plus tard avec les meilleurs sprinteurs au monde à une très honorable 7ème place. Cela montrait la capacité du jeune coureur (il a 24 ans) de se battre dans un sprint massif, d'autant plus qu'il n'avait pas de train pour lui amener le sprint comme la plupart des sprinteurs.
étape 14 - Cette étape était le décord d'une performance collective agressive et joliment orchestrée par l'équipe MTN-Qhubeka. Comme cette étape avait une première moitié relativement plate et une arrivée au sommet après une montée rude, il y avait moyen de voir un coureur dans une échappée remporter l'étape. Après 50 kilomètres, un groupe de 23 coureurs s'était détaché, avec trois coureurs de MTN-Qhubeka : Jaco Venter, Jacques Van Rensburg et Louis Meintjes. Même si le physique explosif de Jaco Venter avec ses 73 kg ne lui donnait aucune chance de victoire à l'arrivée, il était essentiel dans l'échappée. Sur les routes en plaine il tirait sur l'échappée, augmentant ainsi l'écart, alors que Van Rensburg protégeait Meintjes afin d'augmenter ses chances dans la montée finale. Une fois dans la montée le groupe était réduit à seulement 8 coureurs et Meintjes était un des premiers à attaquer. Sur la ligne c'était Ryder Hesjedal (Garmin-Sharp) qui a pris la victoire alors que Meintjes prenait une belle 5ème place. Avant la course, Meintjes disait : Dans la Vuelta je cherche juste à finir et être content de mes performances. C'est difficile de parler de résultats quand on n'a jamais couru à ce niveau, donc je ne peux pas m'attendre à un résultat particulier. Pour le débutant en Grand Tour à 22 ans, un top 5 dans une étape de montagne était donc une performance incroyable et cela fait de lui un bel espoir pour le futur.
Louis Meintjes devant Merhawi Kudus - photo par Ilona kamps
étape 17 - Après sa présence dans l'échappée dans la 7ème étape, Daniel Teklehaimanot attaquait à nouveau dans l'étape 17. Il était parmi les coureurs les plus actifs dans l'échappée de 5 coureurs et produisait une moyenne de 300 Watts dans cette étape. Cet effort héroique était néanmoins quand même insuffisant pour rester devant le peloton et Teklehaimanot a été repris à 20 kilomètres de l'arrivée.
Arriver à la dernière étape de la Vuelta avec tous les 9 coureurs était une belle surprise et il est fort probable que les experts ne s'y attendaient pas. Il n'y a eu que 5 des 22 équipes, tous au niveau UCI WorldTour avec les avantages de coureurs plus âgés et avec plus d'expérience et avec un budget beaucoup plus élevés, qui y sont également parvenues. Et cela alors que seulement 6 mois plus tôt, des organisateurs de course avaient dit à Doug Ryder que 'MTN-Qhubeka manquait de profondeur' et 'n'affichait pas de performance régulière'. Mais ces doutes ont été enlevés efficacement dès que l'équipe a pu participer dans un Grand Tour. La façon agressive de courir de l'équipe a permis d'animer la course et de mettre des fans de cyclisme à croire en un succès de cette équipe. MTN-Qhubeka montrait également sa profondeur et sa régularité en transformant des attaques en résultats. Parmi eux on peut citer un top 20 dans le classement général, le port du maillot blanc du classement "combiné" de la Vuelta ainsi que 3 places dans le top 10 des étapes.
Le fait d'être au départ de la Vuelta était déjà une performance en soi pour les 8 coureurs africains. Ensuite, ils ont tous dû faire face à une châleur importante, des étapes longues, des chutes, des maladies et des blessures pour rejoindre l'arrivée. Cette performance n'était pas seulement une preuve de leurs capacités, mais également de leur esprit et de leur courage. Cela est particulièrement vrai pour les coureurs du World Cycling Centre Africa. La phrase de Doug Ryder qui disait Nous sommes sur le point d'exposer le cyclisme africain au monde n'est plus maintenant un rêve mais devenue réalité.
- Rob Child, de l'Elite Sport Group (ESG), est l'expert en nutrition de l'équipe MTN-Qhubeka et est donc souvent impliqué dans les activités de l'équipe. De temps en temps, Rob prend un peu de temps pour écrire un article pour velowire.com afin de montrer les coulisses de l'équipe africaine. Dans des articles à venir vous trouverez des informations sur le World Cycling Center Africa, les nouvelles recrues pour la saison 2015 pour MTN-Qhubeka, mais également des sujets plus spécifiques liés au domaine d'activité principale de Rob, la nutrition de l'équipe. Si vous cherchez à savoir quelque chose de particulier sur l'équipe, n'hésitez pas à poser vos questions ! Dans la mesure du possible, vous trouverez peut-être la réponse à vos questions dans un des futurs articles de Rob.
En attendant, n'hésitez pas à visiter le site web d'Elite Sport Group ou le site officiel de Team MTN-Qhubeka.
Toutes les photos dans cet article ont été fournies par Rob Child, sauf si mentionné autrement.
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cette publication est référencée dans : Dans les coulisses de MTN-Qhubeka | Vuelta a España 2014
La participation de la première équipe Pro Continentale africaine, MTN-Qhubeka, et Merhawi réservent définitivement une place à l'Afrique dans le cyclisme et seront le précurseur de la prochaine génération de cyclistes africains qui viendront révolutionner le monde du cyclisme.